mardi 4 mars 2008

SUB-FOURBURE

(suite de la page "FOURBURE" )


La fourbure est un phénomène qui passe rarement inaperçu ne serait-ce qu'à cause des difficultés de locomotion qu'elle impose au cheval.

En revanche, il existe des formes incomplètes de fourbure qui sont plus difficiles à détecter, et qu'il faudrait apprendre à reconnaître car :
  • Elles sont un signal d'alarme avant, peut-être, une fourbure plus grave,

  • En les ignorant, on pourrait faire des erreurs de maréchalerie qui pourraient les aggraver,
  • Elles peuvent modifier la démarche du cheval : sans le savoir, son cavalier pourrait alors réclamer des allures ou des mouvements qui seraient devenus difficiles, voire douloureux pour son cheval.
Nous avons rencontré un cas semblable sur un cheval d'endurance. Il s'agit d'un étalon Pur Sang Arabe. Il avait participé, quelques semaines auparavant à une couse d'endurance de 90 km, particulièrement éprouvante, car par temps de grosse chaleur. Il avait passé les différents contrôles vétérinaires avec succès et avait terminé la course dans des conditions reconnues généralement comme bonnes. A aucun moment, ni pendant la course, ni pendant les semaines qui ont suivi, il n'a montré de signes de boiterie. Bien sûr, cette course l'avait fatigué, mais c'était, somme toute, assez normal. Il est resté ensuite au repos, dans son cadre habituel, et principalement au pré.

Et pourtant, malgré toutes ces apparences de normalité, ses antérieurs ont subi une "mini" fourbure que nous appellerons "sub-fourbure". Voici comment elle s'est inscrite dans la corne de ses sabots :

(Les photos ne sont malheureusement pas très bonnes, ce dont nous vous prions de nous excuser. Nous espérons que les schémas permettront de mieux les lire).

6 antérieurs, vus de face


6 Antérieurs, vus de profil


De prime abord, on pense qu'il s'agit là de pieds sains, plutôt bien conformés. Les aplombs sont à peu près corrects, surtout si l'on considère que l'éleveur se prépare précisément à les redresser puisqu'il vient d'entreprendre de referrer son cheval.

Mais si l'on regarde de plus près, on observe des marques sur les sabots, et plus précisément dans la partie supérieure, comme on le voit ici sur le sabot gauche où c'est le plus net.

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6 antérieur gauche. En rouge, la marque la plus récente, en vert plus ancienne





4 schéma descriptif de la photo précédente



De profil on voit les mêmes traces, bien sûr, mais on constate également qu'elles sont en relief, comme sur l'agrandissement et le schéma ci-dessous :
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6 antérieur gauche, vu de profil


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a4 schéma descriptif de la photo précédente
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La marque verte montre sans aucun doute un mieux-être du cheval : la corne est plus pleine, plus épaisse.
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Comme la pousse de la corne (l'"avalure") est d'environ 1 cm par mois, on peut dater les différentes marques. Ainsi, on constate que cette marque verte correspond au début de la période de préparation à la course, et est le résultat d'un meilleur suivi du cheval qui a reçu davantage de soins.
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La trace rouge, elle, date de la course. Elle montre le pli de corne caractéristique de la fourbure : on le voit aussi sur la photo ( et son schéma explicatif) ci-dessous,
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6 pli de corne mis en évidence sur le côté, à droite : (repère noir) . Bien sûr, il se voit aussi à gauche, mais ce n'est pas facile de le distinguer sur cette photo.



D'aucuns pourraient faire l'objection qu'il s'agit, sur la trace rouge du phénomène inverse de la trave verte, où la corne, après avoir connu une période "d'expansion", serait revenue à son apparence antérieure. C'est vrai que cela aurait pu se produire, mais en pareil cas, on observe juste une modification de l'épaisseur de la corne. Elle ne vient pas faire comme un pli, si léger soit-il, à l'intérieur ce la paroi.
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C'est précisément ce détail qui doit nous alerter, et nous devons alors chercher d'autres signes qui viendraient le confirmer.
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Nous allons les trouver ici sous la sole, lors du parage du pied 6
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6 agrandissement de la partie encadrée


4 schéma explicatif de la photo de la sole : entourée d'un trait rose : la zone où se voit une trace rosée, plus ou moins marquée.
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On voit nettement une trace rosée en demi-cercle, dès qu'on commence à parer la sole : cela nous semble suspect et nous allons vérifier en faisant une exploration à la pince à sonder. Avec cet instrument, on peut exercer des pressions plus ou moins fortes sur des points précis du pied. Lorsqu'on appuie sur les endroits "rosés", le cheval manifeste une grande sensibilité et cherche à retirer son pied vivement. La poursuite de l'exploration suivant un arc de cercle englobant cette trace rosée montre la même chose, mais un peu plus atténuée.
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Cette trace rosée, d'abord, puis les réactions du cheval à la pression de la pince à sonder sont très significatives de la présence de l'extrémité de la troisième phalange dans cette zone où elle n'a pas lieu d'être. On peut même dire qu'elle est, à cet endroit, en appui sur la sole. Elle a donc basculé, ce qui pourrait être confirmé par une radio, si on le souhaitait. Mais, ici, l'éleveur ne l'a pas fait faire, les autres signes étant suffisamment probants.
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Le fait d'avoir mis en évidence cette sub-fourbure va faire complètement modifier le parage pour la ferrure qui était prévue : le bon geste consiste à abaisser les talons, de façon à faire revenir la 3ème phalange à sa position correcte, comme ce que nous avons vu dans le "film" concernant la jument fourbue. Ici, il n'y a pas de fourmilière, et la bascule n'est peut-être pas très importante, c'est pourquoi, dans un premier temps, nous ne ferons pas d'avulsion. C'est le parage seul qui va induire la correction de la bascule. Bien sûr, une ajusture sera ménagée sur la voûte en pince, afin que la sole ne risque pas de toucher le fer, et le cheval sera mis au repos pendant quelques semaines.
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Nous avons pu ainsi éviter l'erreur grossière qui aurait consisté, en ne tenant compte que de l'aplomb apparemment un peu "trop bas sur les talons" , de ferrer en relevant les talons : cela aurait confirmé la 3ème phalange dans sa mauvaise position et aurait provoqué des dégats peut-être durables : sollicitation de l'extrémité de cet os avec risque de douleur, ostéite, perforation de la sole, boiterie ...


© Copyright Catherine Castel

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